La compassion demande le courage de voir la réalité telle qu’elle est
Posté par cercletibetverite le 3 décembre 2014
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La compassion demande le courage de voir la réalité telle qu’elle est
C’était l’événement au Grand Rex à l’occasion de la venue de Matthieu Ricard pour Les Rencontres Perspectives. Une file d’auditeurs, tout comme les journalistes, les médias partenaires, les associations… étaient au rendez-vous, la foule se pressait !
Installés confortablement, dans ce lieu mythique, nous avons vu arriver Matthieu Ricard sur scène. Vraisemblablement très surpris d’une salle aussi remplie et en effervescence, alors que, soyons clairs, il remplirait un stade ! Mais humblement, il nous a confié qu’il n’était pas un artiste, ni un grand poète, ni même un peintre mais qu’il redonnait simplement le message d’une ancienne sagesse.
Mais ce soir, Matthieu Ricard n’est pas que le messager du bouddhisme ou de la pleine conscience bienveillante, il est venu nous alerter de nos dérives et nous dire que « nous sommes devant une transformation individuelle et sociétale ». Avec toute la bienveillance que l’on lui connaît, l’espoir tient dans une phrase : « Nous sommes à même d’influencer de façon majeure les générations à venir. »
Matthieu Ricard aime profondément la nature humaine.
A force d’exploration intérieure, il sait et il évoque le merveilleux potentiel dont l’être humain dispose mais ce potentiel ou ces qualités peuvent causer autant d’actions bénéfiques que de torts. C’est vrai pour tout outil : l’intelligence, le charme, l’influence… un marteau peut construire et détruire. « Notre esprit peut être notre meilleur ami ou notre pire ennemi. »
« Il faut constamment vérifier notre motivation », est-ce qu’elle vise notre propre promotion ou celle d’autrui ? Est-ce qu’elle sert le plus petit nombre ou le plus grand nombre de personnes ? Dans une durée à court terme ou à long terme ? On l’aura compris, il nous faut entrer assidûment dans une réflexion pour le bien d’autrui, pour le plus grand nombre et le plus long terme. Entrer de plain-pied dans l’altruisme est une nécessité, parce que « l’activité de l’homme détermine maintenant ce que va devenir notre planète ».
Aujourd’hui nous n’avons plus le choix
Ne se soucier que de son propre confort et de ses envies parfois compulsives, sans en imaginer un instant les répercussions, relève d’une non responsabilité.Notre consommation effrénée est devenue un déni.
Les conséquences, nous les connaissons depuis longtemps – enfin, nos dirigeants -, nous avons tant de fois été alertés, mais c’était demain, et demain, c’est aujourd’hui !
Si les changements climatiques ne sont pas spectaculaires au point de nous faire sentir leur urgence, certains chiffres sont parlants.
Dans les années 50, nous commencions l’exploitation des sols, les changements climatiques se faisaient déjà sentir. Le flux d’azote s’élevait tranquillement et notre consommation d’eau douce suivait le pas. Mais les dernières données montrent que nous avons été beaucoup plus loin : les océans sont acidifiés, la biodiversité se restreint (nous perdons chaque année près de 1000 espèces) et la quantité d’azote était déjà de +260% en 2012. Quant au méthane et à l’effet de serre qu’il entraîne, ils sont la conséquence directe de l’élevage intensif, conséquence elle-même plus importante que la pollution par le transport. L’homéostasie n’est plus qu’une idée abstraite, nous avons bel et bien « gagné » nos 2 degrés, il faudra compter 200 millions de réfugiés climatiques dans quelques années.
Photo : Olivier Adam - Matrice de Rocktröm
Nous élevons intensivement et nous tuons intensivement.
C’est le point que voulait exposer Matthieu Ricard en nous conviant à cette conférence. Son livre Plaidoyer pour les animaux traite de ce thème sans concession. Il nous a d’ailleurs montré quelques images trash de maltraitances animales, de traditions indéboulonnables et d’abattoirs… Nous tuons par jour 60 millions d’animaux terrestres et 1000 millions d’animaux marins en pensant qu’ils ont été créés pour nous satisfaire, sans nous soucier de leur souffrance. « Nous agissons avec « l’intelligence » du droit du plus fort alors que nous disposons de facultés merveilleuses pour naviguer sur les étoiles ». Ces images, beaucoup de gens ne veulent pas les voir à cause de la détresse empathique qu’elles suscitent : on est, là encore, dans un déni, celui de la violence. Nous savons et sentons que les animaux sont des êtres sensibles, nous avons tous au moins plongé les yeux dans ceux d’un animal domestique en y trouvant une lueur, alors pourquoi cette compassion connaît-elle des barrières ?
La compassion demande le courage de voir la réalité telle qu’elle est.
Nous apprenons jour après jour et dans divers domaines à nous distancier, des autres ou des situations, dans le but de nous protéger. De cette distanciation, sorte de pare-feu de nos émotions, naît une froideur, c’est celle de la résistance. Oui, on résiste, pas question de se faire toucher intérieurement, cela demanderait ensuite une action, mais laquelle ?
Nous avons tout à perdre à résister : nous guettent l’épuisement en premier lieu, alors que le flux compassionnel est très régénérant, l’isolement ensuite, nous couper de nos ressentis nous prive de liens riches avec les autres et enfin la peur, l’assèchement du cœur…
En revanche nos actions, au regard de la compassion, nous motivent et nous responsabilisent. Elles demandent un engagement de notre part, elles mettent nos qualités au service d’une cause qui résonne juste.
Se transformer soi-même pour mieux servir les autres
Ce changement individuel et sociétal appelle à une transformation, de soi en premier lieu : méditer, explorer, écouter ce qui se dit dans le silence, calmer son esprit, faire face à ses ombres pour mieux les libérer et trouver ses propres réponses. La méditation est l’outil par excellence et celle de la pleine conscience bienveillante est facile à appréhender par tous. Loin d’être une idée utopique, la méditation élève le comportement pro-social, elle permet de se relier au vivant en soi, de reconnaître le vivant dans l’autre, quel que soit l’autre. Appelons-la empathie, altruisme, bienveillance ou compassion, la « reliance » fait son chemin et de différentes façons. De plus en plus de gens tendent vers un engagement local, collaboratif, l’économie positive représente aujourd’hui près de 7% de l’économie mondiale. Puis, la coopération est une grande source de joie dans l’existence. On s’aperçoit qu’un niveau progresse par la qualité de ses liens sociaux. Si vous avez un lien social riche et fort, la durée de vie est augmentée, et les risques d’addiction sont diminués.
Du sens et de la cohérence
Aujourd’hui, les jeunes qui s’engagent dans un travail ont besoin d’y trouver du sens, sinon à quoi bon ! Pour apporter du sens à notre vie, peut-être pouvons-nous commencer par devenir plus cohérents avec nos choix, car nous le savons, le choix exprime qui nous sommes et nous pouvons commencer par nos choix quotidiens. L’information circule vite, elle est disponible pour qui veut bien la chercher. On ne plus dire : « Je ne savais pas ». Non, car on sait que pour produire 1 kg de viande (protéine animale, qui n’est pas indispensable par ailleurs) il faut 10 kg de protéine végétale, ajoutons à cela l’eau et le coût du transport des céréales pour nourrir l’animal. On sait aussi que durant la période de famine qui touchait l’Afrique, on livrait des céréales en Angleterre pour nourrir les bêtes…
Matthieu Ricard nous dit : « Osons l’altruisme ! » A ces mots, un silence, comme si une question nous avait été posée mais ce n’en est pas une…
Pour finir, je reprendrai la citation de Ralph Waldo Emerson
L’idéal de la vie n’est pas l’espoir de devenir parfait. C’est la volonté d’être meilleur.
Myriam Morisseau
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